Le parlement européen s’apprête à voter « pour » ou « contre » la directive dite « Copyright », sur les droits d’auteur dans l’univers numérique au sein de l’Union européenne. Quels sont les enjeux de cette directive européenne impliquant les GAFA ?

Décryptage par Christophe Caron, professeur de droit à l’Université Paris-Est Créteil.

« L’un des objectifs de la directive est en réalité de créer une coopération entre les titulaires de droits et les prestataires de services de la société de l’information »

Quel est l’intérêt de cette directive européenne dite « copyright » ?

Ce n’est pas la première directive à l’échelle européenne sur le droit d’auteur. Elles sont même très nombreuses en réalité.

L’une d’entre elles, datant de 2001, concernait principalement le droit d’auteur dans la société d’information, soit internet. Datant de plus de dix-sept ans, il est nécessaire de la compléter, tant les dernières années ont été riches en matière de nouvelles technologies et d’évolution numérique.

Aussi, il ne s’agit pas d’abroger ou de modifier ce texte, mais davantage de proposer une actualisation des règles de l’Union européenne sur les droits d’auteurs et ce uniquement dans l’univers numérique.

Quels sont les enjeux de cette nouvelle directive ?

Cette directive sur le droit d’auteur pourrait s’avérer très importante à l’intérieur du marché unique numérique. Pourquoi ? Car elle pourrait permettre de répondre à certaines questions et certaines attentes, avec notamment la création d’un droit voisin du droit d’auteur pour les éditeurs de presse ou de créer de nouvelles exceptions au monopole du droit d’auteur pour permettre des recherches de textes ou de données.

C’est également un texte qui pourrait servir d’arme afin de préserver le patrimoine culturel, tout en offrant la possibilité d’exploiter des œuvres introuvables ou indisponibles et de les diffuser par le biais d’institutions culturelles, comme l’Institut National de l’Audiovisuel (INA) par exemple.

Le texte aborde également la portabilité qui fait débat et qui pourrait permettre à l’utilisateur abonné à des services en France de continuer à en bénéficier lors de ses déplacements au sein de l’Union, ce qui n’est pas forcément le cas aujourd’hui.

L’objectif final de la directive est aussi de créer une coopération entre les titulaires de droits et les prestataires de service de la société de l’information, et donc de faire en sorte qu’un lien se crée entre des titulaires d’œuvres musicales ou audiovisuelles et des exploitants de sites internet comme YouTube ou d’autres plateformes sur les réseaux sociaux.

Quelle est la raison des tensions existantes autour de ce texte ?  

Deux points principaux cristallisent en ce moment les débats au Parlement européen.

Comme évoqué précédemment, la directive pourrait aboutir à la mise en place d’un droit voisin de l’entreprise de presse, ce qui constituerait une possibilité pour la presse de rentabiliser ses investissements dans l’univers numérique. Concrètement, la presse considère aujourd’hui qu’elle investit énormément pour mettre en ligne et diffuser ses contenus et que des acteurs comme les GAFA, Google et Facebook en tête, génèrent des bénéfices majeurs en utilisant ces contenus sans reverser aucune contrepartie.

Ce droit voisin a donc pour finalité de permettre aux éditeurs de presse d’avoir une arme juridique pour monnayer la reprise de leurs contenus par les géants de l’internet.

Le second point, relatif à l’article 13, porte sur les relations entre les titulaires du droit (audiovisuel, musique, cinéma) et les prestataires de la société de l’information tels que YouTube ou Dailymotion par exemple.

L’objet de cet article est de permettre une coopération entre les deux parties afin de lutter contre la contrefaçon et de retirer plus rapidement des contenus contrefaisants déjà publiés.

Adopté partiellement ou entièrement, l’avenir de cette directive est aujourd’hui tout à fait incertain avant son vote du 12 septembre.

Par Christophe Caron