Par Christophe Lachièze, professeur à l’Université Paris 8

Ordonnance n° 2020-538, 7 mai 2020 : JO 8 mai 2020

C’est en application de l’article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 (JO 24 mars 2020, texte n° 1) qu’a été adoptée l’ordonnance n° 2020-538 du 7 mai 2020 relatif (sic) aux conditions financières de résolution de certains contrats en cas de force majeure dans les secteurs du sport et de la culture. Cette ordonnance a pour objet de venir en aide aux professionnels des secteurs du sport et de la culture sans pour autant sacrifier les droits des consommateurs. Elle est inspirée de l’ordonnance du 25 mars 2020 qui a été adoptée pour venir en aide aux professionnels du secteur du tourisme (Ord. n° 2020-315 : JO 26 mars 2020, texte n° 35. – V. not. C. Lachièze, Covid-19 : Un dispositif exceptionnel pour aider les professionnels du tourisme : JCP G 2020, act. 483, Aperçu rapide. – J.-D. Pellier, Coronavirus : une ordonnance pour sauver les professionnels du tourisme : D. 2020, p. 729). On présentera son domaine d’application et son contenu.

Domaine d’application

L’ordonnance concerne trois catégories de contrats. Il s’agit en premier lieu des contrats d’accès « à une ou plusieurs prestations de spectacles vivants, y compris dans le cadre de festivals, et leurs éventuels services associés, conclus entre des personnes morales de droit privé exerçant les activités d’entrepreneurs de spectacles vivants au sens de l’article L. 7122-2 du Code du travail, responsables de la billetterie, et leurs clients directement ou par l’intermédiaire de distributeurs autorisés par elles » (Ord. n° 2020-538, art. 1er, I, 1°). En deuxième lieu, sont concernés les contrats d’accès « à une ou plusieurs manifestations sportives, et leurs éventuels services associés, conclus entre les personnes morales de droit privé exerçant les activités d’organisateurs ou propriétaires des droits d’exploitation de manifestations sportives au sens de l’article L. 333-1 du Code du sport, responsables de la billetterie, et leurs clients directement ou par l’intermédiaire de distributeurs autorisés par elles » (Ord. n° 2020-538, art. 1er, I, 2°). En troisième lieu sont visés les « contrats d’accès aux établissements dans lesquels sont pratiquées des activités physiques et sportives mentionnés aux article L. 322-1 et L. 322-2 du code du sport et leurs éventuels services associés, conclus entre les personnes morales de droit privé exploitant ces établissements et leurs clients » (Ord. n° 2020-538, art. 2, I).

Sont exclus du domaine d’application de l’ordonnance les contrats faisant partie d’un forfait touristique ou d’une prestation de voyage liée au sens du 2° du I de l’article 1er de l’ordonnance n° 2020-315 du 25 mars 2020 (préc.).

L’ordonnance est applicable à la résolution des contrats visés, « lorsqu’elle est notifiée entre le 12 mars 2020 et une date antérieure au 15 septembre 2020 inclus » (Ord. n° 2020-538, art. 1er, I et art. 2, I). Le point de départ de cette période cadre parfaitement avec la loi d’habilitation (comp. Ord. 2020-315, 20 mars 2020, art. 1er, I) et son terme semble adapté au regard de la crise sanitaire.

Contenu

Par dérogation au droit commun (C. civ., art. 1218 et 1229), le professionnel n’est pas obligé de rembourser le client ; il peut, s’il le souhaite, lui « proposer » un avoir en lieu et place du remboursement (Ord. n° 2020-538, art. 1er, II, et art. 2, II). Cette formulation, que l’on trouve déjà dans l’ordonnance du 25 mars 2020 concernant le secteur du tourisme (Ord. n° 2020-325, art. 1er, II), tient de l’euphémisme. Le client n’a aucunement la possibilité de refuser l’avoir qui lui est attribué.

Lorsqu’un avoir lui est attribué, le client ne peut demander le remboursement de ses paiements. Le client est informé sur un support durable de la délivrance de l’avoir et des modalités de son utilisation au plus tard 30 jours après la résolution du contrat ou, si celle-ci est intervenue avant la date d’entrée en vigueur de l’ordonnance, au plus tard 30 jours après cette date d’entrée en vigueur (Ord. n° 2020-538, art. 1er, III, al. 2, et art. 2, III, al. 2).

Afin de permettre l’utilisation de l’avoir, le professionnel doit proposer au client une nouvelle prestation. Celle-ci doit être équivalente à la prestation initialement prévue, son prix ne doit pas être supérieur et elle ne peut donner lieu à aucune majoration tarifaire autre que celles prévues au contrat initial (Ord. n° 2020-538, art. 1er, IV, et art. 2, IV). Cette proposition doit être formulée dans un délai de 3 mois à compter de la notification de la résolution et préciser la durée pendant laquelle le client peut l’accepter. Cette durée court à compter de la réception de la proposition et ne peut pas être supérieure à 6 mois pour les contrats d’accès aux établissements dans lesquels sont pratiquées des activités physiques et sportives (Ord. n° 2020-538, art. 2, V), à 12 mois pour les contrats relatifs aux prestations de spectacles vivants et à 18 mois pour les contrats relatifs aux manifestations sportives (Ord. n° 2020-538, art. 1er, V). Lorsque le professionnel propose à ses clients qui en font la demande une prestation dont le prix est différent de celui de la prestation initialement prévue, le prix à acquitter « tient compte de l’avoir » (Ord. n° 2020-538, art. 1er, VI, et art. 2, VI).

Enfin, à défaut de conclusion d’un nouveau contrat dans le délai de validité de l’avoir, le client retrouve son droit au remboursement (Ord. n° 2020-538, art. 1er, VII, et art. 2, VII). Le remboursement doit être automatique.

 

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