Patrick Balkany, condamné pour fraude fiscale et le délit de blanchiment d’argent et de corruption, avait fait appel et déposé deux demandes de mise en liberté.
La cour d’appel de Paris a accepté, ce lundi 28 octobre, la première demande de remise en liberté de Patrick Balkany,  qui reste incarcéré en attendant la décision concernant sa seconde demande.

Décryptage par Stéphane Detraz, Enseignant-chercheur à l’université Paris Sud (Paris Saclay), faculté Jean Monnet, IDEP.

« La cour d’appel peut remettre un individu en liberté  si elle estime que la situation personnelle du condamné  fait obstacle à son incarcération en raison de son âge ou de son état de santé »

Pourquoi la Cour d’appel a-t-elle accueilli la demande de remise en liberté de Patrick Balkany ?

Le mandat de dépôt permet au tribunal correctionnel qui condamne le prévenu à une peine d’emprisonnement d’au moins 1 an sans sursis d’ordonner l’incarcération immédiate de l’intéressé, « lorsque les éléments de l’espèce justifient une mesure particulière de sûreté » (article 465 du Code de procédure pénale), c’est-à-dire pour éviter qu’il ne se soustraie à la justice au moment de le rejuger en appel ou de mettre à exécution la sanction – ce que peuvent laisser craindre, par exemple, sa fortune, ses réseaux ou sa dangerosité propre. En cas de contestation de cette décision, la cour d’appel peut alors remettre l’individu en liberté pour trois séries de raisons, en considérant : que le danger censé justifier l’incarcération n’est pas avéré ; que cette dernière est d’une gravité excessive eu égard au risque qui se présente ; que la situation personnelle du condamné y fait obstacle pour tel ou tel motif (son âge, son état de santé, etc.).

Dans le cas de Patrick Balkany, condamné à quatre d’emprisonnement du chef de fraude fiscale, il apparaît que la cour d’appel a tenu compte de son état de santé, conjugué à son âge, l’intéressé s’étant plaint de la fragilité actuelle de sa constitution physique et des douleurs qui l’assaillent. Patrick Balkany avait également nié que le mandat de dépôt fut radicalement justifié par un quelconque besoin d’éviter qu’il ne s’enfuie. Mais la cour d’appel a malgré tout estimé qu’un placement sous contrôle judiciaire demeurait nécessaire, et ordonné à cette occasion, entre autres mesures restrictives de liberté, l’interdiction de quitter le territoire français – outre le dépôt d’un cautionnement de 500 000 euros.

Cette décision pourrait-elle avoir une incidence sur la deuxième demande de mise en liberté de Patrick Balkany ?

Patrick Balkany doit – à tout le moins pour l’heure – demeurer incarcéré, car, dans une autre procédure, il a également fait l’objet d’un mandat de dépôt, en complément cette fois-ci de sa condamnation pour des faits de blanchiment à une peine d’emprisonnement « ferme » de cinq ans. En effet, la décision favorable dont il bénéficie déjà dans l’affaire de la fraude fiscale n’a pas d’incidence directe sur son placement (son maintien) en détention ordonné dans la seconde affaire.

Cependant, il a également contesté le bien-fondé de cet autre mandat de dépôt, et l’on peut donc facilement imaginer que, pour les mêmes raisons que précédemment, il obtienne derechef gain de cause.

Si cette deuxième demande était acceptée, que risquerait-il de se produire ? Patrick Balkany pourrait-il reprendre ses fonctions ou être réélu ?

Une éventuelle remise en liberté décidée par la cour d’appel (le cas échéant à la faveur d’un placement sous contrôle judiciaire) aura pour effet de mettre fin à l’incarcération du condamné prononcée à titre de mesure de sûreté en vertu de l’article 465 précité. En revanche, elle n’équivaut pas à une invalidation de la décision de condamnation ni, donc, à un anéantissement de la peine d’emprisonnement prononcée.

Pour autant, Patrick Balkany ayant interjeté appel des deux condamnations qui le visent, et cet appel étant suspensif, les peines qui lui ont été infligées ne peuvent être mises à exécution, y compris les peines complémentaires d’inéligibilité prononcées. S’il recouvre sa liberté, il pourra donc retrouver de manière effective son poste de maire (c’est actuellement son épouse qui le remplace, en vertu de l’article L. 2122-17 du Code général des collectivités territoriales) ; et si des élections se tiennent avant une éventuelle condamnation définitive l’empêchant d’y concourir (ainsi des élections municipales à venir), il pourra s’y présenter.

Pour aller plus loin :

Par Stéphane Detraz.